1908 |
Un texte publié pour la première fois en 1908, pour le vingt-cinquième anniversaire de la mort de K. Marx. |
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Il y eut cinquante ans, le 14 mars 1908, que mourut Karl Marx, et il y a déjà un siècle que parut le Manifeste Communiste où sa doctrine fut exposée, dans ses grandes lignes, pour la première fois. Ce sont là des époques déjà bien lointaines pour nous qui sommes d’un temps où la vie est si trépidante et où les conceptions scientifiques et esthétiques changent plus souvent que la mode. Cependant Karl Marx vit encore d’une vie intense parmi nous. Il domine plus que jamais la pensée contemporaine, malgré toutes les crises de marxisme et malgré toutes les objections et les réfutations des représentants officiels de la science bourgeoise.
Il aurait été complètement incompréhensible que son influence fût aussi extraordinaire si Marx n’avait réussi à découvrir les assises encore ignorées de la société capitaliste. Après de telles découvertes, il ne reste plus de connaissances sociologiques d’importance primordiale à acquérir qui soient telles qu’elles dépassent Marx, aussi longtemps que la forme actuelle de la société se maintiendra. On peut dire aussi que, pendant toute cette période, sa méthode sera plus fructueuse que n’importe quelle autre.
L’influence puissante et durable de Marx sur la pensée moderne aurait été encore incompréhensible s’il n’avait su dépasser par la pensée le mode de production capitaliste. Il en révéla les tendances qui mènent à une forme supérieure de société et dont les buts, bien que fort éloignés, se rapprochent continuellement, devenant de plus en plus tangibles au cours de l’évolution. Au fur et à mesure que l’on constate ces faits, on comprend davantage la grandeur de l’homme qui les a prophétisés.
C’est la fusion si rare de la profondeur scientifique avec l’audace révolutionnaire, qui le fait vivre avec bien plus d’intensité un demi-siècle après sa mort que lorsqu’il était parmi les vivants.
Si nous voulons définir le caractère de la contribution historique de cet homme prodigieux, le mieux sera peut-être de dire qu’elle est une synthèse de domaines différents et souvent même contradictoires : nous y trouvons avant tout le synthèse des sciences naturelles et des sciences psychologiques, la synthèse de la pensée anglaise, française et allemande, celle du mouvement ouvrier et du socialisme et celle enfin de la théorie et de la pratique. C’est parce qu’il a réussi non seulement à connaître ces domaines du savoir avec une universalité sans pareille, mais encore à posséder ces connaissances d’une manière magistrale qu’il lui fut possible de fournir la formidable contribution historique qui marque de son sceau les derniers lustres du dix-neuvième et les deux premiers du vingtième.
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