1956

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! – LA LUTTE de CLASSE n° 4 [a]


LA LUTTE DE CLASSE

Barta

18 décembre 1956


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PAS DE "PROJET" DES GARANTIES !

Les menaces de chômage s'accroissent surtout dans l'automobile et les industries qui en dépendent. La pénurie d'essence qui a précipité la crise est loin d'être terminée. On dit même qu'il y a peu d'espoir de revenir à un approvisionnement normal avant l'automne prochain. Dans ces conditions l'automobile que la crise menaçait déjà depuis un an risque d'être entièrement paralysée et les autres secteurs en subir le contre-coup.

Dans cette perspective, Albert GAZIER ministre des Affaires sociales, aurait projeté, selon la presse, de revaloriser les allocations de chômage partiel et de les étendre même aux petites entreprises.

Mais cela ne veut suffire aux travailleurs. Les allocations de chômage partiel sont versées sur la base du SMIG (128 frs. de l'heure) et elles ne le sont que lorsque l'horaire est inférieur à 40 heures et jusqu'à concurrence de ces 40 heures. A l'heure actuelle la majorité des travailleurs de l'industrie est obligée de faire un horaire largement supérieur pour arriver à vivre. Le projet GAZIER reviendrait à vouloir "garantir" un salaire inférieur à 30.000 frs., c'est à dire à nous faire supporter entièrement le poids de la crise. Si l'Etat ne peut payer, que les patrons payent, mais les travailleurs ne peuvent accepter des salaires inférieurs à ce qu'ils gagnent à l'heure actuelle. Lorsque les entreprises s'enrichissaient elles "mettaient de côté" pour l'avenir en nouvelles machines, en redistribution de capital, etc... Maintenant que la crise est arrivée, les patrons et le gouvernement voudraient que les travailleurs seuls en fassent les frais. Maïs ils craignent leurs réactions, c'est pourquoi le gouvernement s'occupe de rassurer la classe ouvrière par des "projets" qui malgré leur présentation alléchante renverraient les travailleurs à la soupe populaire.

Monsieur GAZIER qui le sait bien, aurait dit-on, d'autres projets si la crise s'aggravait. Mais c'est maintenant qu'il nous faut des assurances.

Le seul "projet" qui puisse satisfaire les travailleurs c'est que le gouvernement et les patrons garantissent qu'il n'y aura aucun licenciement et aucune diminution de la paye actuelle même si les horaires diminuent.


[*]

LE TEST HONGROIS

"L'ordre" règne de nouveau à Budapest, sinon en Hongrie. Cependant malgré une répression de plusieurs semaines, les tanks russes ne sont pas venus complètement à bout de la résistance héroïque de la population. La lutte armée des ouvriers et des paysans se poursuit en province, tandis que les arrestations massives et les cours martiales frappent les conseils ouvriers de Budapest et de province. Le "gouvernement" Kadar et les Russes ne reculent devant aucun moyen et tentent désespérément, à n'importe quel prix, de reprendre la situation en main, de restaurer à la fois la domination de la Russie sur la Hongrie et la toute puissance d'une bureaucratie totalitaire sur les ouvriers et les paysans hongrois – celle-ci étant la condition première de celle-là.

Le drame hongrois, le terrible drame DES OUVRIERS ET DES PAYSANS hongrois tombant en 1956 sous le feu des canons russes a été le TEST DECISIF pour le régime stalinien des "démocraties populaires" et de l'URSS. En 1948, le conflit avec la Yougoslavie n'alla pas jusqu'à la guerre ouverte pour deux raisons : d'un côté, à l'époque, Staline n'a pas trouvé un Kadar yougoslave qui justifiât l'intervention de l'armée russe. D'un autre côté, Moscou pensait pouvoir obliger la Yougoslavie à capituler sous sa seule pression politique et économique et éviter ainsi les risques d'une intervention armée dont ils avaient cependant menacé Tito. Le conflit avec la Yougoslavie n'avait donc pas encore montré, DANS TOUTE SON ETENDUE, la dégénérescence anti-ouvrière et oppressive de la caste bureaucratique de l'URSS que révèle aujourd'hui la tragédie hongroise : aucun crime ne lui est impossible ; sa vraie nature est anti-socialiste.

Eclairés par la tragédie hongroise, tous les ouvriers conscients, tous les véritables communistes comprennent maintenant cette vérité essentielle pour l'avenir du mouvement ouvrier, pour l'avenir du socialisme. Seuls continuent à ne pas comprendre, ceux qui à tout jamais sont, dans le mouvement ouvrier les adversaires du socialisme, les ennemis de l'émancipation des travailleurs malgré leurs paroles "socialistes" ou "communistes" : tel Thorez qui approuve l'intervention des troupes russes en Hongrie.

Bien sûr, il y a ceux pour qui les événements de Hongrie sont une occasion de plus pour cacher, derrière les crimes staliniens, leurs propres actions anti-socialistes. Mais ceux-là, les Mollet, les Lacoste, les Pineau, avec leur guerre en Afrique du Nord et leur "coup de Suez", il y a longtemps que les travailleurs conscients les connaissent pour ce qu'ils sont.

Le test hongrois, c'est le sang des dizaines de milliers d'ouvriers et de paysans tombés pour leur liberté : être POUR l'intervention soviétique en Hongrie c'est être CONTRE l'émancipation de classe des travailleurs de tous les pays, c'est être CONTRE le socialisme.


ACTUALITES

Cette semaine, les actualités françaises cinématographiques commémorent le cinquantenaire du Ministère du Travail. Elles retracent en images les différentes étapes qui ont marqué l'évolution des lois sociales depuis 50 ans.

1906 d'abord, c'est le repos hebdomadaire

1919, la journée de 8 heures

1926, la semaine anglaise

1936, les 40 heures, les conventions collectives, les congés payés.

1955, les "accords Renault".

Et la bande se termine en concluant que le Ministère du Travail a bien œuvré pendant ce demi-siècle.

A croire que pour les journalistes qui ont assemblé ces images, le Ministère du Travail a été pendant 50 ans un organisateur de grèves.

En effet, comme ils nous le rappellent eux-mêmes ingénument, chacun de ces avantages avant d'être entériné par une loi a été l'objet d'importantes luttes grévistes.

1906- 1919- 1926- 1936- 1955 sont des dates de l'histoire du mouvement ouvrier. Et c'est le plus souvent – ces images en donnent d'ailleurs une preuve flagrante – contraint et obligé que le Ministère du Travail a "bien œuvré".

Cette bande d'actualités est à voir. En remuant de vieux souvenirs, elle peut nous aider à juger du présent.

Que la lutte paie, les travailleurs le savent. Merci aux Actualités françaises de l'avoir illustré.


"A toute les nations composant la Russie doit être reconnu le droit de se séparer librement et de se constituer en Etats indépendants. Nier ce droit et ne pas prendre des mesures propres à garantir son application pratique, équivaut à soutenir la politique de conquête ou d'annexions. Seule la reconnaissance par le prolétariat du droit des nations à se séparer assure la solidarité complète des ouvriers des différentes nations et favorise le rapprochement démocratique véritable des nations."

(Lénine, 1917)


Note

[a] Cette série de La Lutte de Classe, bulletin ronéotypé, a été éditée par le groupe Voix Ouvrière.
Barta collabora à sa rédaction. Les articles qui lui sont attribués avec certitude sont signalés par un [*].


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