1929

Source : La Vérité n° 1 – 15 août 1929
Ce numéro doit beaucoup, sinon tout, à la collaboration de Trotsky.

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Opposition de Gauche

Numéro 1 de "La Vérité"
Organe de l'opposition communiste

15 août 1929


Aux Ouvriers Révolutionnaires

Après dix années d'existence, l'Internationale Communiste est en complet recul. Son emprise sur la classe ouvrière va sans cesse et régulièrement s'atténuant. Ses sections, travaillées les unes après les autres, par de graves crises intérieures, s'anémient Leurs effectifs sont en diminution constante.

C'est un fait si certain, si évident que les dirigeants des partis communistes sont contraints de le reconnaître.

L'un deux a pu caractériser le Parti français comme une passoire. L'expression est juste. Il faut ajouter : une passoire qui retient de moins en moins de substance solide.

Ce qui est vrai pour le Parti est également vrai pour la C.G.T.U. Là aussi, il a fallu en faire l'aveu public.

Divers remèdes ont été essayés pour enrayer cette désagrégation inquiétante. Tous se sont révélés inefficaces. Ils ne s'attaquaient pas à la racine du mal.

Des organisations ouvrières qui se montrent incapables de retenir leurs membres sont des organisations qui n'inspirent pas confiance aux ouvriers.

Si les présents dirigeants de l'Internationale Communiste se sont imaginés qu'ils pouvaient impunément chasser du Parti Communiste russe les meilleurs ouvriers d'Octobre, les persécuter, les déporter, les exiler, ils ont simplement fourni la preuve qu'ils ne comprennent rien eu mouvement ouvrier.

S'ils se sont crus capables de guider la classe ouvrière dans sa lutte quotidienne contre la bourgeoisie, ils se sont illusionnés sur leurs mérites et sur leurs talents.

Leur tactique zigzagante, oscillant entre le putsch et l'opportunisme borné, menant même parfois les deux en même temps, alarme et décourage les ouvriers sérieux.


Le régime intérieur des partis bannit toute discussion approfondie. Il faut approuver aveuglément toute décision signifiée par le centre – ou s'en aller.

La vraie et saine critique que toute organisation ouvrière doit, non pas redouter mais désirer, a été remplacée par une caricature de critique baptisée autocritique.

Un tel régime ne peut s'imposer et durer qu'à coups d'exclusions. Les communistes authentiques sont chassés du Parti. D'autres se mettent silencieusement à l'écart, espérant que cela ne durera pas toujours.

Faut-il s'étonner que dans ces conditions, les partis communistes soient des passoires ?


Partout, maintenant, les communistes hors du Parti sont nombreux. Et partout, les forces d'opposition ont été amenées à se grouper.

Dans l'Union Soviétique, l'opposition mène stoïquement la lutte, malgré une répression qui dépasse en brutalité, en cruauté raffinée, la répression tsariste.

En dehors de l'Union Soviétique, la situation varie suivant les pays.
 
Dans certains cas :

En Belgique, aux Etats-Unis, on peut dire que l'opposition forme déjà le vrai Parti. C'est chez elle qu'on trouve les militants capables, les ouvriers de la première heure, les fondateurs du Parti. Les dirigeants staliniens sont ou des socîal-démocrates qui ont gardé leur " chemise sale ", ou des " vieux bolcheviks " de 1923-1928.

Ailleurs, l'opposition n'a pas encore réussi à se rassembler.

C'est notamment le cas en France où les éléments et les groupes d'opposition ne manquent pas, mais où, pour des raisons diverses, ils n'ont pu constituer encore une force capable de se mettre en travers des sottises des dirigeants du Parti – ce qui est le plus urgent – et de faire oeuvre constructive – ce qui est le plus nécessaire.

Ce groupement de l'opposition, c'est la tâche que nous voulons entreprendre.

Les appels du Parti et de sa doublure, la C.G.T.U. tombent dans le vide. Les ouvriers n'y répondent pas. On voit surtout les policiers de Chiappe. Mais cela n'empêche pas Parti et C.G.T.U. de recommencer.

Il faut crier : " Assez ! "

Mais pour être entendu, il est indispensable de parler avec une force suffisante, et surtout de répéter l'avertissement sans se lasser.


Nous croyons que l'opposition a besoin, tant pour son regroupement que pour son action, d'un hebdomadaire édifié sur une base communiste solide.

Cette base communiste, nous la trouvons dans les conceptions théoriques et dans la tactique élaborées par les quatre premiers Congrès de l'Internationale Communiste, complétées par les travaux de l'Opposition communiste russe.
 

C'est l'Opposition communiste russe qui incarne aujourd'hui la courte, mais glorieuse tradition communiste, si riche d'événements qui ont fait trembler le vieux monde.

Dans l'Union Soviétique, elle défend les principes d'Octobre.

Dans l'Internationale Communiste elle maintient la politique à la fois audacieuse et prudente des années 1919-1923.

Il est, du reste, impossible de suivre en même temps une politique juste dans l'Union Soviétique et une politique fausse dans l'Internationale Communiste.

Au zigzag intérieur allant alternativement de la brutalité aux concessions, correspond le zigzag au-dehors : on crie : " classe contre classe " et on affirme sa confiance dans Tchang Kaï Chek au moment où celui-ci a déjà fait venir ses bourreaux pour trancher la tête des communistes.

Telle sera !a base sur laquelle nous demanderons à l'Opposition de se grouper. Elle nous parait indispensable. Sinon l'opposition risquerait d'être seulement une cohue sans action utile possible.


Mais nous ne songeons pas du tout à opposer simplement une nouvelle orthodoxie à une orthodoxie rachitique. Au contraire. Notre journal restera largement ouvert à la discussion.

La période de reflux révolutionnaire que nous traversons, avec les menaces et les difficultés qu'elle renferme, exige une connaissance exacte de la situation, une pratique des luttes ouvrières, un jugement sûr.

La discussion que nous solliciterons nous permettra d'élaborer ensemble une mise au point des problèmes qui intéressent la classe ouvrière et de leur donner des solutions justes.


Le mouvement ouvrier français a besoin d'une cure de vérité.

Il y a des simplifications qui sont des déformations, des grossissements qui sont une injure à la classe ouvrière.

Au reste, la méthode n'est pas nouvelle. C'est la " pédagogie hervéiste ". On sait aussi où elle mène.

 Si l'on pense que la classe ouvrière est encore mineure, qu'elle a besoin d'être dupée au moyen d'inventions comme " le socialisme dans un seul pays ", il faut en tirer les conclusions inéluctables.

Nous pensons, nous, que la classe ouvrière est majeure, qu'elle est capable de prendre tout le pouvoir avec ses seules forces et, en conséquence, qu'elle a droit à la vérité.

L'oeuvre que nous nous sommes assignée ne pourra être menée à bien que si nous trouvons dès maintenant, à Paris, et sur tous les points du pays, des camarades résolus à nous seconder.

Notre budget de dépenses sera réduit au minimum. Il ne comportera nulle rétribution, ni pour la rédaction, ni pour l'administration. Rédaction et administration seront du travail de " samedi communiste ".

Nous nous adressons à tous ceux qui souhaitent le succès de notre œuvre, et veulent s'associer notre effort.

Il nous faut des souscriptions, des abonnements. Partout où cela est possible, des groupes d'amis du journal doivent se constituer qui étudieront les moyens d'assurer la diffusion du journal dans leur coin ou dans leur région.

Un journal qui ne peut recueillir les ressources dont il a besoin pour vivre, c'est : ou qu'il ne représente pas un mouvement viable, ou que ceux qui le font ne savent pas exprimer ce mouvement.

L'Opposition communiste en France n'a besoin que de se trouver pour être une force.

Nous voulons que son journal vive.

H. Audoin, Marthe Bigot, L. Charbit, Jeanne Despallières, P. Frank, Gourget, L. Marzet, A. Mougeot, Sarah Menant, R. Rey, A. Rosmer

 

Il y a, à notre point de départ, la conviction que le système soviétique renferme de grandes ressources et d'immenses réserves, et la marche de l'opposition ne mène pas à l'effondrement du pouvoir soviétique, mais à son renforcement et à son développement.

L. TROTSKY.

 

La journée du 1er août et sa leçon

Il était trop facile de prévoir ce que serait la journée du 1er août. L'Internationale Communiste voulait, à travers le monde, une puissante démonstration de masse, un avertissement solennel et fort donné par la classe ouvrière aux fauteurs de guerre. Elle n'a réussi qu'à donner une nouvelle preuve de sa présente faiblesse, qu'à montrer l'isolement de ses sections dans le mouvement ouvrier. Ses dirigeants sont pris clans un engrenage et leur incapacité les empêche de s'en dégager. Automatiquement, des fautes nouvelles succèdent aux fautes précédentes. Il faudrait dire aux crimes.

Les conditions inouïes de légèreté dans lesquelles cette " journée rouge " fut annoncée et préparée, le péril qui en résultait pour la classe ouvrière, amenèrent l'Opposition communiste internationale à intervenir publiquement. Par un texte intitulé : " Que prépare la journée du 1er Août  ", publié par sa presse et sous forme de tract, elle mit les travailleurs en garde et les appela à engager sans tarder l'action nécessaire. La démonstration, dans la forme où l'avaient annoncée les dirigeants de l'Internationale Communiste devait être radicalement condamnée et partout devaient lui être substituées des manifestations sérieusement étudiées, en rapport avec les forces présentes du prolétariat. Rappelons les passages principaux de cet appel :

" Le " Bureau de l'Internationale Communiste pour l'Europe Occidentale " a invité les ouvriers du monde entier à descendre dans la rue, le 1er août. Cette manifestation doit être une réponse à la répression sanglante exercée par la social-démocratie allemande contre l'avant-garde des ouvriers berlinois. Ce crime historique, commis le 1er mai, ne peut rester et ne restera pas impuni, cela ne fait aucun doute pour les révolutionnaires, Toute la question est de savoir quand et comment l'on pourra tirer vengeance de la social-démocratie et de ses maîtres bourgeois pour les actes de violence par lesquels ils ont répondu à la manifestation du 1er mai. La voie choisie par l'Internationale Communiste cet radicalement fausse. Elle prépare tout simplement une nouvelle défaite.
[...]
" Il est hors de doute que le 1er mai a refoulé en arrière le parti communiste allemand. Cela ne signifie pas que ce recul soit définitif ou même durable. Le crime sans exemple commis par la social-démocratie pénétrera peu à peu la conscience des masses ouvrières et les aidera à accomplir leur évolution vers le communisme. Là-dessus, il ne peut y avoir aucun doute, à une condition pourtant : que le parti communiste ait une politique à peu près juste.

" Si c'est de ce point de vue que nous envisageons la situation, la première question à poser est celle-ci : que faut-il actuellement aux ouvriers berlinois, aux ouvriers allemands et à tous les autres ? Convient-il de refaire un 1er mai ou bien de s'assimiler les leçons du 1er  mai dernier ? La question même comporte sa réponse. Une répétition de ce qui a eu lieu, serait inconcevable et inadmissible. Ce serait purement et simplement une stupide aventure. Il faut que l'on s'assimile les leçons, que l'on apprécie justement ce qui s'est passé. Il faut adopter une ligne politique qui soit juste.

" Nous avons dit que le 1er mai ne peut artificiellement s'élever au-dessus du niveau politique du mouvement. La cause ne sera pas mieux servie par une multiplication de "journées rouges" bureaucratiquement fixées sur le calendrier. Or, l'Internationale Communiste tente de prendre, le 1er août, la revanche du 1er mai. On peut dire, dès à présent, et il faut dire bien haut pour que tout le monde l'entende, que la " journée rouge " du 1er août est d'avance condamnée à un échec. Bien plus, ce qu'il y a eu de positif dans la journée du 1er mai, l'abnégation d'une partie de l'avant-garde prolétarienne, sera réduit au minimum le 1er août. Mais ce qu'il v a eu de négatif le 1er mai, l'esprit d'aventure, sera infiniment plus fort le 1er août.
[...]
" Mais cela ne signifie nullement qu'il suffira à Thaelmann, à Staline, à Manouilsky ou à Sémard de prendre un calendrier et de marquer d'un trait rouge la journée du 1er août pour faire de ce jour un événement révolutionnaire. Ce procédé-là accuse les traits les plus néfastes du bureaucratisme et de l'esprit d'aventure. Dans les pays et dans les partis où le pur bureaucratisme sera le plus fort, c'est-à-dire dans la majorité des cas, le 1er août selon toute probabilité, s'achèvera par un fiasco grotesque dans le genre de la manifestation des Sémard et des Monmousseau à Vincennes. Dans les pays où l'esprit d'aventure sera le plus fort, le 1er août peut s'achever par une tragédie qui, cette fois, différemment du 1er mai, sera totalement et irrémissiblement à l'avantage de l'ennemi. L'appel lancé de Berlin, le 8 mai, par le Bureau de l'Internationale Communiste pour l'Europe Occidentale, – bien que nous soyons accoutumés à beaucoup de choses, – est stupéfiant de légèreté, de verbosité, d'infatuation et il est odieux de voir à quel point ces gens ont peu le sens de leurs responsabilités.

" Tous  dans la rue, prolétaires ! " " A bas la guerre impérialiste ! "  " Assimilez-vous  l'expérience politique et la technique de lutte du prolétariat berlinois ! " " Tenez compte des méthodes de lutte de la police ! " " Acquérez la capacité de manoeuvrer ! " " A l'appui que vous apporterez au prolétariat berlinois, joignez les revendications quotidiennes des larges masses prolétariennes ! " " A bas la guerre impérialiste ! " " Tous dans la rue, prolétaires !... "

" En d'autres termes, on prescrit aux partis communistes européens une tâche rigoureusement déterminée par le calendrier : en trois mois (de mai à août), établir la liaison avec les plus larges masses ouvrières (ni plus ni moins), apprendre à manœuvrer, tenir compte des méthodes de lutte de la police, s'assimiler, au point de vue politique comme au point de vue de la technique militaire, l'expérience de la lutte et descendre dans la rue pour combattre... la guerre impérialiste. Il est difficile d'imaginer un document plus pitoyable que celui-ci qui prouve que l'appareil gouvernemental, à force de cogner sur le crâne du Comintern, est parvenu à l'abrutir d'une façon inquiétante. Et cette direction de crétins, s'armant des idées et des mots d'ordre qu'on vient de lire, avertit la bourgeoisie de toute l'Europe que, le 1er août, elle fera descendre les ouvriers dans la rue, " et qu'ils seront munis de toutes les armes qu'imposent les méthodes de la technique militaire ! " ... Peut-on risquer plus impudemment le sort de l'avant-garde prolétarienne et l'honneur de l'Internationale Communiste que ne le font ces misérables épigones, et Staline à leur  tête ? "

Bien des phrases de ce texte sont prophétiques. On n'ose pas trop s'en féliciter. Avec la présente direction de l'Internationale Communiste, il est trop facile d'être prophète.

L'Opposition communiste avait été surtout alarmée par l'esprit d'aventure qui menaçait de provoquer de nouvelles fusillades policières. Cet esprit d'aventure, les ouvriers communistes réussirent à l'éliminer. Leurs protestations furent si fortes contre la sottise aveugle de leurs dirigeants que ceux-ci furent contraints de battre en retraite. Mais ils le firent sans franchise, hypocritement, ne cherchant qu'à biaiser et à dissimuler. La démonstration telle qu'elle avait été primitivement fixée était abandonnée, mais on ne voulait pas le dire et on se mettait ainsi dans l'impossibilité d'élaborer et de préparer une journée contre la guerre selon les moyens capables d'entraîner une large partie du prolétariat.

Les lourdes fautes de l'Internationale Communiste rendent facile l'action répressive de la bourgeoisie. Le bluff stalinien souligne les échecs ouvriers, Tardieu pourrait souhaiter l'inventer s'il n'existait pas. Il lui permet de poser au sauveur de la " civilisation " capitaliste. Sa "démocratique " méthode d'arrestations préventives en masse tend à se généraliser. Mais elle n'est possible que parce que la masse ouvrière reste sourde aux appels du Parti communiste et de la C.G.T.U.

La " journée rouge " est restée à peu près complètement inaperçue dans la plupart des pays. C'est seulement en France et en Allemagne qu'elle a pu être remarquée.

Le préfet de police social-démocrate de Berlin qui, le 1er mai dernier, avait affolé ses policiers et provoqué d'odieuses fusillade, avait pour le 1er Août autorisé les manifestations. De sorte qu'on assista au défilé classique de cortèges ouvriers, avec rassemblement, discours et dislocation au Lustgarten. Les policiers circulaient en camionnettes, assez discrètement, autour des cortèges. Il n'y eut pas le moindre incident. Le Parti communiste avait demandé aux ouvriers de sortir de l'usine une heure plus tôt qu'à l'ordinaire. A quelques rares exceptions près, les ouvriers firent leur pleine journée de travail. Les social-démocrates avaient leur démonstration sur un autre point de la ville. La presse se félicita de la façon paisible dont la " journée " s'était passée.

En France, Tardieu et son préfet aggravèrent encore le système inauguré par eux lors des manifestations antérieures. Au cours des semaines précédant le 1er  Août, ils emprisonnèrent tous les militants dont ils purent se saisir ; les juges à tout faire distribuaient largement mois et années de prison ; le 1er Août, pour la première fois, l'Humanité fut saisie. Les dirigeants du Parti communiste et de la C.G.T.U. avaient d'abord parlé de grève générale. Ils se rabattirent sur une grève d'une heure ; les cheminots devaient se conformer à une stricte application du règlement.

Cette fois encore, ce qu'on vit le plus en cette journée, ce furent les policiers de tous genres mobilisés par dizaines de mille. Sur divers points du pays, les ouvriers ne se laissèrent pas intimider par le déploiement de forces policières et manifestèrent courageusement. Mais des régions entières restèrent complètement passives. A Paris, les chauffeurs de taxi qui, dans ces circonstances, sont toujours là pour sauver l'honneur, répondirent moins bien que d'habitude à l'ordre de grève.

Cette " journée rouge " a  provoqué un profond malaise dans la classe ouvrière, Il serait tout à fait vain de le nier et les rodomontades de l'Humanité ne font qu'en souligner la gravité et l'étendue. Les ouvriers sentent bien qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans la direction de leurs organisations. Ils trouvent que la police est trop bien renseignée ; ils s'étonnent de la voir surgir au cours des réunions secrètes des organismes dirigeant (Achères, Villeneuve-Saint-Georges) ; ils trouvent aussi que les rédacteurs de l'Humanité sont d'une légèreté criminelle.

Ils se demandent avec inquiétude si leurs chefs entendent continuer à provoquer des échecs qui sont une invitation directe à l'offensive et à la répression patronales. Après Ivry, Saint-Denis, le 1er Mai, Vincennes, ce 1er Août. Quoi demain ? La persistance dans une politique imbécile ?

Il dépend d'eux que cela change. L'autocritique est une belle invention des chefs : elle assure leur inamovibilité car, par elle, ce sont toujours les ouvriers ou, au plus, les petits fonctionnaires qui ont tort. Elle ne permet pas d'atteindre les grands chefs – les vrais responsables.

Il faut étendre la critique jusqu'au sommet et ne pas hésiter à chasser les incapables. En tout cas, il faut en finir avec une politique qui conduit régulièrement la classe ouvrière à la défaite. Pour cela, il faut tirer la leçon de la journée du 1er Août, qui n'est pas un fait isolé, accidentel, mais le couronnement de toute une politique. C'est une étude que nous entendons poursuivre dans nos prochains numéros et, pour la mener utilement, avec le maximum d'informations sûres, nous demandons à nos camarades de nous envoyer dès maintenant leurs observations, leurs réflexions, leurs critiques. Qu'ils nous disent comment les choses se sont passées dans leur coin, dans leur organisation : une étude approfondie et complète de cette désastreuse journée peut seule en empêcher le renouvellement.


L'Internationale communiste, par sa sottise, fournit à la bourgeoisie l'occasion d'une victoire facile au moment où l'Union soviétique se trouve aux prises avec la contre-révolution chinoise. Cela montre une fois de plus que les staliniens ne sont pas plus capables de défendre les ouvriers soumis au joug capitaliste que l'Union soviétique. Mais à ce sujet il importe de préciser les positions. En Allemagne, le camarade Urbahns a publié dans son journal un article dénonçant l'" impérialisme russe ", à propos du conflit concernant le chemin de fer de l'Est chinois. Il a indiqué, en note, que cet article n'était inséré que " pour discussion " et qu'il y serait répondu. Mais c'est déjà trop qu'un tel article soit accepté même " pour discussion ". Ici, le dernier numéro de Contre le Courant contient un leader qui n'est pas publié " pour discussion " mais exprime l'opinion de la rédaction toute entière, et peut même laisser croire que c'est là l'opinion de toute l'opposition communiste. Or, le camarade Trotsky, interrogé par un journaliste américain, a eu l'occasion de formuler publiquement son point de vue sur cette question. Il est, cela va sans dire, diamétralement opposé à celui défendu dans les deux articles ci-dessus mentionnés. Trotsky termine sa déclaration en disant que dans ce conflit l'Opposition communiste russe est naturellement aux côtés de l'Etat soviétique. Pour notre part, nous dénonçons et nous combattons le stalinisme, mais nous sommes et serons toujours avec l'Union soviétique quand elle sera attaquée par la contre-révolution, comme elle l'est dans le cas présent par la contre-révolution de Tchang Kaï Chek, soutenue visiblement par les impérialismes d'Europe et d'Amérique.

LA VÉRITÉ.


Camarades,
" La Vérité " paraîtra prochainement sur huit pages, dont une large place pour ses correspondants.
Ecrivez-nous ! Donnez-nous sans crainte votre avis sur le premier Août ; citez-nous des faits de votre région.
Que vous nous critiquiez ou que vous dénonciez la politique des chefs du Parti, notre accueil sera fraternel.

" La Vérité "
Hebdomadaire de l'Opposition Communiste
45, Boulevard de la Villette, Paris Xe.
Comité de Redaction :
H. Audoin, Marthe Bigot, L. Charbit, Jeanne Despallières, P. Frank, Gourget, L. Marzet, A. Mougeot, Sarah Menant. R. Rey, A. Rosmer.

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