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Chef du parti national-socialiste allemand, dictateur du troisième
reich.
Au début de sa carrière politique, Hitler ne se
distinguait, peut-être, que par un tempérament plus énergique, une
voix plus forte, une étroitesse d'esprit plus sûre d'elle-même. Il
n'apportait au mouvement aucun programme tout prêt, si ce n'est la
soif de vengeance du soldat humilié. Hitler commença par des
injures et des récriminations contre les conditions de Versailles,
la vie chère, le manque de respect pour le sous-officier méritant,
les intrigues des banquiers et des journalistes de la foi de
Moïse. On trouvait dans le pays suffisamment de gens qui se
ruinaient, qui se noyaient, qui étaient couverts de cicatrices et
d'ecchymoses encore toutes fraîches. Chacun d'eux voulait frapper
du poing sur la table. Hitler le faisait mieux que les autres. Il
est vrai qu'il ne savait pas comment remédier à tous ces malheurs.
Mais ses accusations résonnaient tantôt comme un ordre, tantôt
comme une prière adressée à un destin inflexible. Les classes
condamnées, semblables à des malades incurables, ne se lassent pas
de moduler leurs plaintes, ni d'écouter des consolations. Tous les
discours d'Hitler étaient accordés sur ce diapason. Une
sentimentalité informe, une absence totale de rigueur dans le
raisonnement, une ignorance doublée d'une érudition désordonnée :
tous ces moins se transformaient en plus. Cela lui donnait la
possibilité de rassembler toutes les formes de mécontentement dans
la besace de mendiant du national-socialisme, et de mener la masse
là où elle le poussait. De ces premières improvisations,
l'agitateur ne conservait dans sa mémoire que ce qui rencontrait
l'approbation. Ses idées politiques étaient le fruit d'une
acoustique oratoire. C'est ainsi qu'il choisissait ses mots
d'ordre. C'est ainsi que son programme s'étoffait. C'est ainsi que
d'un matériau brut se formait un " chef ".
Léon Trotsky, Qu'est-ce
que le national-socialisme ?, 1933
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